La revue belge Alter Échos (à ne pas confondre avec son homonyme français Alter éco) publie, sous la plume de Cécile Charlier, Blanca Ferran Duran et Abraham Franssen, un intéressant résumé de nombreuses recherches récentes sur l’identité professionnelle des agents d’insertion, sous le titre « Les activateurs : mettre les chômeurs au travail… sur eux-mêmes ». J’en livre ici un aperçu.
Les facilitateurs ont été recrutés par l’Onem, l’assurance chômage belge qui en a recruté environ 180. Un chercheur et un journaliste en ont interviewé plusieurs, qui ont manifesté un profond malaise. En effet, ils sont confrontés à des ordres non écrits mais néanmoins extrêmement stricts en ce qui concerne la rentabilité (un certain nombre de cas doivent être traités dans un laps de temps donné). « Dans un premier temps, j’avais une grande liberté pour mener ma mission à bien. Je concevais mon travail comme une guidance. Je prenais le temps nécessaire pour faire évoluer chaque personne. Maintenant les cadences s’accélèrent, je me sens obligé de faire du chiffre. Je sens une telle pression que je me dis : Cette fois, ça y est, la chasse aux chômeurs est ouverte ! »
Les conseillers d’accompagnement professionnel du Forem (le service public wallon de l’emploi) sont moins directement soumis à l’injonction de contrôle, de même que les conseillers emplois de l’Orbem (l’équivalent dans la région de Bruxelles), des missions locales et des services de l’insertion socio-professionnelle. Cependant, ils n’en sont pas moins traversés de tensions liées aux écarts et décalages entre les différentes représentations de leur mission. Alors que leur motivation première tout comme les attentes spontanées des « demandeurs d’emploi », portent sur l’accès à l’emploi, leur travail consiste principalement « à mettre l’individu au travail… sur lui-même ». Un conseiller
Pour Luc Piloy, directeur de la
Denis Castra, chercheur à l’Université de Bordeaux II, interroge les effets d’un tel positionnement identitaire et relationnel du professionnel pour l’usager lui-même. Dès lors que le levier de l’emploi n’est pas en leur pouvoir direct, les agents d’insertion, tendent à poser un diagnostic psycho-motivationnel et à situer à ce niveau les difficultés et obstacles éprouvés par l’usager. Au risque de privilégier une lecture et un traitement clinique du chômeur.
Des agents de la mission locale de Forest don Luc Piloy, directeur, au fond à droite